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L’épopée du canal de Suez : remarquable aventure au cœur du monde à l’Institut du monde Arabe

1869. L’Égypte se prépare à un grand bouleversement : l’inauguration d’une voie maritime permettant de relier l’Europe à l’Asie sans contourner l’Afrique. Une véritable révolution ! L’Institut du Monde Arabe retrace les dessous d’un des projets les plus fous de notre monde moderne. De son histoire antique jusqu’à la percée d’une deuxième tranchée en 2015, L’épopée du canal de Suez nous permet de mieux comprendre les enjeux d’un canal dont l’histoire ne fait que débuter.

L’exposition s’ouvre sur l’inauguration du canal de Suez à Port-Saïd, le 17 novembre 1869. Parmi les milliers d’invités conviés à cette occasion figure l’impératrice Eugénie. Le faste et la somptuosité exigés par le Khédive et vice-roi d’Égypte Ismaïl Pacha nous saisissent d’emblée. Cet événement représente l’entrée de son pays dans une ère moderne et indépendante. Il est donc crucial.

épopée du canal de Suez

Une histoire ancienne

En raison de sa position géographique stratégique, la percée du canal de Suez n’est finalement que l’aboutissement de nombreux autres projets ayant vu le jour au cours de l’Histoire. Tout commence il y a près de 4 000 ans avec Sésostris III. Il crée un canal entre le Nil et la mer Rouge afin de faciliter le commerce. Au fil du temps, il fut ensablé, modifié, prolongé, délaissé avant d’être détruit au VIIIe siècle pour éviter une invasion maritime.

épopée du canal de Suez

Par la suite, l’exploitation de l’isthme a été envisagée à de multiples reprises, sans succès. Il faut attendre l’accord de 1854 entre le diplomate français Ferdinand de Lesseps et le roi d’Égypte Saïd Pacha pour aboutir à l’élaboration du canal que nous connaissons.

Une prouesse technique

Entre les conditions météorologiques, les contraintes géographiques et la pénibilité du travail, des dizaines de milliers d’Égyptiens réquisitionnés périssent. Profitant de l’essor technologique de l’époque, de nombreuses machines innovantes sont alors créées de façon à améliorer les conditions de travail. Au terme de dix années de travaux colossaux, le chantier s’achève enfin.

Néanmoins, sa position stratégique dérange…

épopée du canal de Suez épopée du canal de Suez

Une source de convoitise

Peu de temps après, face à son déficit important, l’État égyptien est contraint de céder ses parts de la Compagnie universelle du canal maritime de Suez. Suite à leur rachat par la Grande-Bretagne, l’Égypte se trouve ainsi sous tutelle financière franco-britannique.

Face à une occupation étrangère de la zone du canal de Suez, sa reconquête devient une priorité nationale.

épopée du canal de Suez

C’est chose faite le 26 juillet 1956 lorsque Gamal Abdel Nasser annonce la nationalisation du canal. Alors, les relations internationales avec l’Égypte deviennent houleuses et de nombreuses guerres s’ensuivent jusqu’en 1975 dans le but d’obtenir le contrôle de cette zone géographique privilégiée.

Un pari pour l’avenir

Régulièrement élargi ou creusé, le canal atteint son record d’affluence en 2008. Il se voit même doublé en 2015 dans le but de faciliter le croisement des bateaux. Son importance est telle qu’il est la troisième source de revenu du pays.

Situé au centre du monde et lien tangible entre les civilisations, le canal de Suez n’a donc pas fini de nous surprendre !

Bonus : de nombreuses activités sont proposées en lien avec l’exposition : visites guidées, concerts, conférences, ateliers pour ravir petits et grands !

by Jean-Philippe

épopée du canal de Suez

Exposition L’épopée du canal de Suez

Jusqu’au 5 août 2018

du mardi au vendredi de 10h à 18h
samedi et dimanche de 10h à 19h

À l’Institut du Monde Arabe
1, rue des Fossés-Saint-Bernard
75015 Paris
Tél : 01 40 51 38 38

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Compartiment Fumeuses : inespéré et touchant éveil à la vie

Les notions d’évasion, d’épanouissement ou tout simplement de beauté ne nous viennent pas à l’esprit lorsque nous évoquons l’univers carcéral. Pour autant, c’est bien de tout cela dont il s’agit dans Compartiment Fumeuses. Deux femmes que tout oppose font connaissance dans un espace restreint, dénué en apparence de toute liberté. Aucune n’imagine alors que cette promiscuité forcée va leur permettre de s’affranchir. Au Studio Hébertot, découvrez leur improbable rencontre apportant éclat et tendresse là où nous ne l’attendions pas…

Suzanne est une jeune femme forte et insoumise. Fille de chalutier breton au physique imposant, elle dicte sa loi en prison, allant même jusqu’à obtenir certains privilèges de la part de la gardienne. Multirécidiviste, kleptomane de nature, elle a commis de menus larcins afin d’égayer le quotidien de son fils.

Tout va changer lorsqu’une voisine de cellule lui est imposée. Il s’agit de Blandine de Neuville. Frêle, distinguée et élégante, elle est ancienne professeur de français d’un âge certain. En attendant son procès, elle est ici en détention provisoire, pour la première fois.

Ce sont bel et bien deux mondes distincts qui se rencontrent. Le contraste entre la culture, l’éducation ou le milieu social va peu à peu s’estomper au fil des jours grâce à leur bon sens sous l’œil quelque peu jaloux de leur geôlière.

Ainsi, elles s’ouvrent mutuellement et se confient avec pudeur et délicatesse. Chacune trouve en l’autre le moyen de combler un manque. Tandis que Blandine apaise de sa bonté la colère de Suzanne, celle-ci lui témoigne une affection respectueuse et désintéressée. De là vont se tisser des sentiments forts et inattendus…

Compartiment fumeuses

Un message vital

Dans cette pièce, l’être humain se confronte dans ses ambiguïtés avec une justesse et une finesse inouïes. Toute la portée du texte de Joëlle Fossier tient dans le fait d’éclairer des thèmes aussi sombres que la prison, la violence faite aux femmes ou l’injustice grâce à la douceur, la bienveillance, l’espoir et bien entendu l’amour.

Au final, ce qui est le plus intense dans cette œuvre, c’est l’incroyable force de sa poésie…

En femme désabusée par la dureté de la vie, Sylvia Roux nous émeut. Quant à Bérengère Dautun… Nous sommes sous le charme… Au cours de la pièce, lorsque nous arrivons à capter son regard devenu pétillant, des frissons nous parcourent. Car c’est bien dans ses yeux que nous comprenons l’importance et la puissance de l’amour… Nathalie Mann vient compléter ce merveilleux tandem en surveillante tiraillée entre la dureté de sa fonction et son cœur, caché mais bien présent.

Compartiment Fumeuses est une histoire de femmes devenues libres. Tout y est sublime… Comme elles, comme toutes les femmes.

by Jean-Philippe

Compartiment fumeuses

Compartiment Fumeuses

De : Joëlle Fossier
Mise en scène : Anne Bouvier
Avec : Bérengère Dautun, Sylvia Roux et Nathalie Mann

Jusqu’au 14 avril 2018

Les jeudis, vendredis à 19h et le samedi à 21h

Au Studio Hébertot
78, bis Boulevard des Batignolles
75017 Paris
tél. 01.42.93.13.04

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Dom Juan ou les limbes de la mémoire : mise à nue de l’éternel séducteur

Interpréter Dom Juan est pour Patrick Rouzaud une passion évidente. Au fil du temps, ne pouvant pas se résoudre à abandonner le plus beau rôle de sa vie, il décide de détourner et d’adapter le texte original pour en imaginer une version inédite. Ainsi, Dom Juan ou les limbes de la mémoire, au Théâtre La Croisée des Chemins, est un pari inattendu et réussi où le personnage de Molière se dévoile à travers une étonnante introspection à la lisière de sa vie…

L’effet de surprise commence dès notre arrivée. En effet, un bureau en bois surmonté d’une lampe d’un autre temps fait face à une confortable méridienne. Tel un rendez-vous chez le psychanalyste, les comédiens investissent l’espace.

Face à un homme énigmatique, Dom Juan s’allonge. Il semble fatigué, usé. Nous comprenons alors qu’il arrive à un moment où il doit faire le bilan de sa vie passée. Un huis clos débute.

Guidé adroitement par ce mystérieux homme, la mémoire de l’illustre enjôleur se met en marche. Insidieusement, les fantômes de ses souvenirs se réveillent.

Ainsi, la réflexion des conséquences de ses actes sur sa propre vie mais également sur son fidèle valet Sganarelle, son épouse bafouée Done Elvire ou encore son père dupé, oblige Dom Juan à effectuer un voyage au plus profond de son intimité. S’il se livre à nous avec le panache de sa splendeur passée contrastée avec l’angoisse perceptible de sa mort prochaine, va-t-il réussir à affronter ses démons ?

En repoussant Dom Juan dans ses propres retranchements, ce remarquable cheminement permet de mettre en avant une facette méconnue du personnage, développant ainsi son caractère humain et vulnérable. Le plaisir de Patrick Rouzaud a interpréter son rôle ne fait que renforcer l’intensité des mots de Molière habilement sélectionnés. Le tout est souligné par une mise en scène astucieusement réfléchie.

C’est grâce à des adaptations comme Dom Juan ou les limbes de la mémoire que les classiques traversent le temps et continuent à nous surprendre !

by Jean-Philippe 

Dom Juan ou les limbes de la mémoire

Dom Juan ou les limbes de la mémoire

De Molière
Adaptation : Audrey Mas
Mise en scène : Sonia Ouldammar
Avec : Patrick Rouzaud et Aymeric Marvillet

du 14 septembre au 4 novembre 2018

vendredi à 20h
dimanche à 17h
durée : 50 minutes

Au Théâtre La Croisée des Chemins
43, Rue Mathurin Régnier
75015 Paris
Réservations : 01 42 19 93 63

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Trop tout : agréable partage avec Nadine Charvolin

Quelle personne ne s’est jamais entendue dire au moins une fois dans sa vie : «Tu ne fais rien comme tout le monde, fais les choses normalement ! ». Mais normalement pour qui, par rapport à qui ou à quoi ? Avec le concours de sa personnalité affirmée et lassée de cette notion de « normalité », Nadine Charvolin a donné naissance à Trop tout. À son image, découvrez au Théâtre la Croisée des Chemins un seule-en-scène à la fois dynamique, authentique et subtilement touchant.

Trop Tout

Dès sa naissance, Nadine Charvolin a tout de suite su qu’elle était différente : trop grande, trop mince puis trop grosse, trop de caractère, trop de joie de vivre communicative (oui, oui, on le lui a reproché !). La façon dont elle évoluait et s’épanouissait ne correspondait pas à la «norme». Pour autant, elle était parfaitement intégrée à la société mais quelques remarques ou de petits mots lui rappelaient régulièrement qu’elle tanguait dangereusement sur le mauvais côté du cadre.

Cette différence revendiquée la mène a des rencontres cocasses, pittoresques, surprenantes et paradoxalement banales qu’elle se décide à nous raconter. Tout y passe, les hommes bien sûr, les collègues de travail, la crise identitaire des adolescents, les ami(e)s…

Nous allons donc passer un peu plus d’une heure à rire, à rêver, à se révolter ou à réfléchir sur ces situations faisant finalement partie de notre quotidien. D’ailleurs, la comédienne n’hésite pas à entrer en interaction avec le public. Elle sait donner le ton pour nous transporter dans son univers composé de musique, de bonne humeur, d’une fine autodérision et d’un humour subtil auquel nous adhérons !

Ainsi, lorsque les lumières s’éteignent, une inattendue et amusante table ronde se met en place avec Nadine, notre nouvelle copine. Nous commençons alors à bavarder, à échanger, à rire encore et surtout à partager. Au final, toute la portée de ce spectacle au genre aussi indéfini que son initiatrice est là. Se servir de son histoire afin de créer un contact humain et c’est très (nous pourrions même dire trop !) plaisant. 🙂

by Jean-Philippe 

Trop Tout

Trop tout

De et avec : Nadine Charvolin
Mise en scène : Nadine Emin, Thomas Bobichon

Les samedis et dimanches à 19h30

Jusqu’au 22 avril 2018

Au Théâtre La Croisée des Chemins
43, Rue Mathurin Régnier
75015 Paris

Réservations : 01 42 19 93 63

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Session of tenderness : festival d’art érotique post-soviétique à Paris

Du 15 mars au 1er avril prochains, le collectif Q Rators en partenariat avec la Queer Week, la galerie Treize et le Point Éphémère, propose un événement entièrement consacré à l’érotisme et aux multiples visions de la sexualité.
Le festival Session of tenderness nous invite à réfléchir sur les normes des rapports intimes, la vision de notre corps et de la beauté dictées par la société.
Pas moins de 17 artistes aux disciplines différentes vont permettre de créer un dialogue artistique entre l’Europe et les pays de l’ex-URSS en s’interrogeant sur le monde actuel.

À cette occasion, nous avons pu interviewer le groupe artistique russe Bobo qui proposera une performance pour le moins inédite : se faire tatouer par de parfaits inconnus ! Le public devra répondre à une question en apparence simple et banale : « Qu’est-ce que l’amour ? » et la réponse restera gravée à tout jamais sur le corps de l’artiste. Votre vision de l’amour conservera ainsi une trace singulière. 😉

Interview

Session of tenderness
Selfie exclusif pour UsofPairs

USOfParis : Confier son corps à de parfaits inconnus est osé. Surtout en conservant une trace à vie. Vous n’avez pas peur ?

Cyanide Zloy : Un peu.
Natalia Petukhova : Il veut juste avoir des tatouages gratuits ! 🙂

La performance que vous proposez est assez radicale. Quel a été l’élément déclencheur du projet ?

Cyanide : En réalité, c’est la suite d’une performance réalisée en 2013 intitulée : « la définition de la liberté », dont le principe consistait à confronter les symboles de la liberté et de l’amour pour avoir une belle photographie.  En fait, ce n’est pas si radical que ça pour l’artiste que je suis, ou pour l’art contemporain en général.

Natalia : Nous aimons l’art et nous voulons vraiment qu’il nous suive à chaque instant… J’ai un gigantesque tatouage tout le long du  corps et ce n’était pas une performance, mais un désir personnel. Les Russes n’ont pas réussi à recouvrir la totalité de ma peau, mes espoirs se tournent alors maintenant vers Paris !

En utilisant votre corps afin de laisser le public s’exprimer, vous pensez qu’il se révélera plus facilement ?

Cyanide : Aucune idée mais je l’espère. Nous verrons ça ensemble pendant la performance !

Natalia : Comme ce sera dans un bar (le Point Éphémère), je pense que le public sera plus détendu et donc plus ouvert. Comme le disait Jacques Lacan, l’être humain a besoin de l’autre pour se comprendre. Ici, l’encre sera cet « autre » pour vous.

Session of tenderness

Quel message souhaitez-vous délivrer par le biais de cette performance ?

Cyanide : Bien entendu, il y a un message codé dans la forme mais je veux laisser le travail de décodage au public ! D’autre part, comme la plupart des œuvres d’art contemporain, cette performance remet en question le sens même de l’art : “Qu’est-ce que l’art ?”
Dans le cas d’un tatouage, c’est un message à long terme, mais il n’est pas éternel car il ne dure que le temps d’une vie humaine. Cette citation résume bien le problème :Ars longa, vita brevis.

Natalia : Pour moi, le message serait « tout est connecté ». Toutes les personnes rencontrées au cours de nos vies laissent une trace en nous. D’anciens tatoueurs soviétiques pensent que le fait de tatouer quelqu’un est quelque chose de sacré, reliant l’artiste et son modèle pour toujours. Et comment peut-on commencer à aimer un garçon russe sinon en le blessant un peu ? 😉

Quel est votre rapport au corps ?

Cyanide : Nous avons nos hauts et nos bas vous savez.

Natalia  : Le concept du festival Session of Tenderness semble être la description plutôt exacte de nos relations avec le corps : le sexe, l’érotisme et l’amour.

Et vous, quelle est votre vision de l’amour ?

Cyanide : Dans la Russie actuelle, lorsque je pense à l’amour, c’est le ministère de l’amour de 1984 de George Orwell qui me vient à l’esprit.

Natalia : L’amour, c’est un peu comme un tatouage. C’est douloureux, c’est un peu dangereux, mais tu en veux quand même 🙂

Comment imaginez-vous l’amour dans le futur ?

Cyanide : Tout dépendra de ce à quoi je vais ressembler après la performance !

Natalia  : Par Wi-Fi. Peut-être que les gens se réuniront dans des bars et se tatoueront avec des nanopuces d’amour.

Quel conseil donneriez-vous aux nouvelles générations à venir ?

Natalia  : Plus il y a de tatouages, mieux c’est !

Une philosophie de vie ?

Cyanide : Il ne sert à rien de me tuer avant mes 70 ans !
Natalia : L’amour partira, le tatouage restera pour toujours !

Session of tenderness

Session of tenderness
festival d’art post-soviétique
par Q Rators

 

exposition à la Galerie Treize
24, rue Moret
75011 PARIS
Du 15 mars au 1er avril
avec échanges entre les artistes Ukrainiens, Russes et Biélorusses : Kseniya Platanova, Seleznev Nikita, Zhanna Gladko, Sergey Shabohin, Alyona Petit et les artistes partenaires de la Queer Week : Sébastien Hamidèche, Céline Drouin Laroche, le collectif Black(s) to the future et Mathilde Fenoll

Les 21 et 22 mars de 20h30 à 23h
Soirées de performances avec Alina Kopytsa, Mikhail Badasyan, Alyona Petit, SVITER art-group, Bobo, Tekhnopoeziya
au Point Éphémère
200 Quai de Valmy
75010 Paris 10

Les 21 et 22 mars dans les laveries du 19ème arrondissement : Concerts de Tekhnopoeziya

Le 23 mars toute la journée : Installation interactive d’Alexandre Budaey, marché Place des fêtes (Paris 19).

Programme complet sur l’Event FB du festival

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Miracle en Alabama @ Théâtre La Bruyère : remarquable & inattendue surprise

« Tout a ses merveilles, l’obscurité et le silence aussi ».
Cette citation d’Helen Keller sied parfaitement à son vécu. Avec Miracle en Alabama, nous sommes touchés par l’intense rencontre entre cette jeune fille sourde et muette, entourée d’un amour familial maladroit et une institutrice atypique, obstinée et avant-gardiste. Entre émotion, persévérance et sensibilité, nous assistons au Théâtre La Bruyère à l’éveil d’un nouveau sens pour Helen : celui de la vie.

Miracle en Alabama

Helen naît en Alabama peu après la guerre de sécession. À deux ans, elle fait une congestion cérébrale à la suite de laquelle elle perd la vue et l’ouïe. Désarmés, impuissants et avec un fond de culpabilité, ses parents la laissent vivre comme elle le désire, la transformant ainsi en enfant sauvage.

En effet, plus le temps passe, plus son rapport au monde devient conflictuel et empreint de colère. Bien qu’aimants, ses parents sont malhabiles et épuisés. Ils décident, en dernier recours avant l’internement, de faire appel à une éducatrice un peu particulière.

Lorsque Annie Sullivan observe le fonctionnement de cette famille soudée mais étouffante, elle ne tarde pas à trouver ce qu’il manque à Helen : être éduquée. Seulement, pour entrer en relation avec elle, il faut élaborer une nouvelle méthode d’apprentissage du langage.

Avec acharnement et ténacité, l’éducatrice communique sans relâche avec Helen, attendant le déclic par lequel tout avancera. La tâche est fastidieuse. Annie doit faire face aux réticences du père, à ses propres démons, à l’archaïsme d’une société en mutation mais également à ses doutes, ses limites.

Une dynamique haletante

Pendant plus d’une heure, nous entrons tour à tour dans la peau des différents protagonistes et nous sommes littéralement happés. Tout comme eux, nous sommes dans l’attente d’un miracle. Le jeu des comédiens est d’une justesse inouïe nous rendant chaque personnage attachant de par ses contradictions et son humanité…

Le plus de cette pièce est le mélange délicat entre l’histoire d’Helen, d’Annie, mais aussi des frasques familiales d’une famille américaine de la fin du 19ème siècle. De ce fait, le rire s’invite, apportant un équilibre parfait entre légèreté et émotion.

À l’issue de la représentation, nous retenons la force de l’amour, de la patience et de la persévérance mais surtout la rage de vivre animant des personnes par lesquelles tout est possible. 🙂

En somme, un beau et subtil moment de théâtre à ne surtout pas manquer !

by Jean-Philippe

Miracle en Alabama

Miracle en Alabama

De William Gibson
Adaptation et mise en scène : Pierre Val
Avec : Pierre Val, Valérie Alane, Stéphanie Hedin, Marie-Christine Robert, Julien Crampon et en alternance Lilah Mekki et Clara Brice

Jusqu’au 31 mars 2018

Du mardi au samedi à 21h
Matinée le samedi à 14h30

au Théâtre La Bruyère
5, Rue La Bruyère
75009 Paris
Tel : 01 48 74 76 99

Représentations surtitrées les : 
17 mars à 14h30
22 mars à 21h
31 mars à 14h30

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Les bijoux de pacotille : tendre regard intérieur sur l’enfance

Quel enfant n’a jamais entendu de la part de ses parents : « Comment feras-tu lorsque nous ne serons plus là ? » Céline Milliat Baumgartner le découvre à l’âge de 9 ans. Dans Les bijoux de pacotille, au Théâtre du Rond-Point, elle part à la (re)découverte d’une jeunesse trop tôt envolée. Ainsi, en ouvrant avec douceur et élégance la porte d’une enfance faite de souvenirs disparus, fantasmés ou inventés, cette œuvre universelle vient délicatement frapper à la nôtre…

Après avoir épuisé un adolescent novice, la jeune et espiègle Céline rejoint paisiblement le pays des songes. Il faut dire qu’elle a l’habitude des baby-sitters avec un père souvent absent pour le travail et une mère actrice. Sauf que le lendemain matin, à son réveil, ils ne sont toujours pas rentrés et elle s’interroge…

les bijoux de pacotilleArrive alors son grand-père, lui donnant des bijoux de pacotille appartenant à sa mère. Ce sont les seuls rescapés d’un tragique accident. Débute ainsi pour la jeune fille une nouvelle vie d’enfant sans parent…

En s’apprêtant à devenir maman à son tour, Céline Milliat Baumgartner ressent le besoin d’écrire afin d’affronter les manques, absences et incertitudes de son passé. Enfin, ce beau travail de réparation la mènera à s’interroger sur la façon dont chaque individu se sert de ses souvenirs, de sa mémoire et de ses fantômes afin d’en dégager le terreau rêvé de sa vie d’adulte.

les bijoux de pacotille

Sur scène se dévoilent des photographies anciennes, des films Super 8, un rapport de police, de subtils tours de magie, un surprenant miroir ou des pointes virevoltantes sur le Lac des Cygnes… Accompagnés de plus d’une mise en scène aérienne et intime de Pauline Bureau, nous sommes saisis par l’univers sensible de la narratrice et ce qu’elle génère au plus profond de nous-mêmes.

Au final, c’est là toute la profondeur de cette pièce : un doux et imprévisible partage…

P.S : la scène où Céline Milliat Baumgartner s’enivre et s’enlace grâce à l’intensité d’un souvenir olfactif est d’une rare beauté…

by Jean-Philippe

Les bijoux de pacotille

Les bijoux de pacotille

De et avec : Céline Milliat-Baumgartner
Mise en scène : Pauline Bureau

du 6 au 31 mars 2018

du mardi au samedi à 20h30
dimanche à 15h30

Au  Théâtre du Rond-Point
2 bis avenue Franklyn D. Roosevelt
75008 Paris

et au Théâtre de Chelles, le 6 avril

Le livre Les bijoux de pacotille
(Éditions Arléa)

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Coupables à la Croisée des Chemins : terrible et viscéral

L’érosion du temps sur une relation peut imposer des silences et des absences sans pour autant dissiper des sentiments forts. Coupables, ce sont les retrouvailles de deux hommes à la dérive de leur vie. Dans l’ivresse, les langues se lient, puis se délient. Chacun réalise l’impact qu’il a pu avoir sur la vie de l’autre. Le lien invisible les unissant apparaît peu à peu, sombre, lourd et culpabilisant. À travers l’amour, l’aversion, la violence et la trahison, découvrez au Théâtre la Croisée des Chemins un thriller psychologique intense, talentueux et saisissant.

Dans un lit, deux hommes s’étreignent, rient, se chahutent.

Coupables

Quentin est venu rendre visite à l’improviste à Alexandre. De passage, il a loupé son train et trouve l’occasion parfaite pour retrouver son ancien ami de faculté à l’attachement indéfini. C’est probablement un signe du destin, qui sait ?

Dans l’euphorie des retrouvailles, ils se racontent leur vie, en surface. Ils parlent de Théo, un ami commun aux rapports tout aussi confus pour chacun et de Xavier, un plan cul d’Alexandre.

Puis, Quentin va trouver une seringue dans les affaires d’Alexandre. Celui-ci tente d’éluder puis s’enfonce dans un mensonge que son ami ne croit pas. De fil en aiguille, chacun va révéler à l’autre la terrible descente aux enfers qu’il vit… S’ensuit alors une montagne russe émotionnelle juste et prenante dans laquelle nous sommes transportés…

Coupables

Bien que nous puissions deviner les liens entre les protagonistes au cours de la pièce, Alexis Bloch arrive à nous perdre, nous captiver, nous enivrer pour nous maintenir en expectative et ça marche… Son style à fleur de peau, mêlant subtilement sensibilité et impétuosité nous a une fois de plus conquis. Bien que furtive, l’apparition de Mahmoud Ktari est touchante, renforçant l’acuité du texte. Et l’interprétation de Benjamin Gourvez est si prenante et émouvante que, submergés, des larmes perlaient par moments sur nos joues…

Nous étions tellement emportés et sonnés par cette intimité partagée que lorsque le rideau est tombé, quelques instants nous furent nécessaires afin de nous reconnecter et applaudir comme il se doit…

by Jean-Philippe

Coupables

Coupables

De et mis en scène par : Alexis Bloch
Avec : Alexis Bloch, Benjamin Gourvez, Mahmoud Ktari

les vendredis et samedis à 21h30

jusqu’au 3 mars 2018

Au Théâtre La Croisée des Chemins
43, Rue Mathurin Régnier
75015 Paris

Réservations : 01 42 19 93 63

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Faire semblant d’être normaux à la Croisée des chemins : mordant & spirituel

Que ce soit par protection, timidité ou vanité, chacun de nous est capable de donner le change face aux autres.
Au Théâtre la Croisée des chemins, un duo insolite composé d’un comédien et d’un pianiste fa craqueler le vernis de nos apparences afin de nous montrer ce qu’il peut y avoir de merveilleux en dessous. Et autant vous prévenir tout de suite : Faire semblant d’être normaux est un pur délice de l’esprit. 😉

Faire semblant d etre normaux

Deux jeunes hommes en combinaison d’ouvrier entrouvrent le rideau rouge et entament un dialogue. L’un est un peu prétentieux, presque outrecuidant tandis que l’autre est plutôt maladroit et timide. Les échanges sont fins, drôles et décalés. Immédiatement, un sourire apparaît sur nos visages. Le ton est donné pour la suite du spectacle !

S’enchaînent alors onze des plus grands textes de Giorgio Gaber et Sandro Luporini. Quel plaisir de découvrir pour la première fois en français les créations de ces précurseurs du genre « teatro-canzone » (théâtre-chanson).

Faire semblant d etre normaux

En effet, la particularité de ce spectacle est une subtile combinaison entre théâtre, musique et chant. Lorsque Benoît Valliccioni s’emporte avec exaltation dans une tentative de séduction, Mattia Pastore le suit par concomitance au piano. Tant et si bien que nous ne distinguons plus si c’est le piano qui accompagne le récit ou l’inverse !

Ainsi, nous suivons avec ferveur Monsieur tout le monde dans sa mise en scène du quotidien à travers la politique, la religion, l’amour, l’argent… Avec brio, énergie et dynamisme, nos deux comparses utilisent l’humour et toutes ses subtilités. Entre poésie et satire, chaque situation nous prête à rire mais également à réfléchir. C’est une excellente stimulation m’ayant rappelé cette citation d’Alexandre Herzen : «Le rire de Voltaire a détruit davantage que les pleurs de Rousseau».

En ce dimanche après-midi, la douce chaleur irradiante du feu de cheminée crépitant que je venais de quitter s’est insufflée en moi d’une autre manière, plus surprenante, mais tout aussi agréable…

by Jean-Philippe 

Faire semblant d etre normaux
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Faire semblant d’être normaux

de : Giorgio Gaber, Sandro Luporini
avec : Mattia Pastore, Benoît Valliccioni
mise en scène : Stéphane Miglierina

Tous les dimanches à 17h30

Jusqu’au 4 mars 2018

Au Théâtre La Croisée des Chemins
43, Rue Mathurin Régnier
75015 Paris

Réservations : 01 42 19 93 63

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Murmures des murs au 13ème art : fantasque et imprévisible

Les lieux où nous vivons ont une caractéristique bien trop souvent négligée : ils portent en eux la mémoire du temps qui passe. Au théâtre Le 13ème Art, Victoria Thierrée-Chaplin nous révèle une femme fuyant à travers la ville. D’immeubles désaffectés en appartements délaissés, elle revit l’espace d’un instant le souvenir de ses occupants détenu par les Murmures des murs… Cette aventure est une plongée délicate dans un monde fantaisiste, oscillant sans cesse entre le rêve, l’illusion et la métamorphose…

murmures des murs

«Il faut partir !» dit un homme. Au milieu de boîtes, une jeune femme déambule, l’air faussement hagard… Avec une certaine mélancolie, elle se met à ranger les objets de son quotidien. Cependant, ils ne se laissent pas faire et entament avec douceur une rébellion. Ainsi, une ampoule reste éclairée malgré le fait qu’elle soit dévissée, des chaussures refusent d’être entreposées dans un carton… Par de subtiles illusions, les prémices du spectacle à venir se font sentir et nous sommes déjà intrigués…

Lorsque Aurélia Thierrée se retrouve happée dans un carton, le voyage commence véritablement… Avec une grâce infinie et un air plein de malice, elle remonte le temps en franchissant des façades ou en escaladant des escaliers à la rencontre d’un endroit, d’histoires entremêlées ou bien d’une âme… Les tableaux défilent et de nombreux personnages croisent son chemin. Nous y trouvons quelques humains et d’autres, l’étant un peu moins !

murmures des murs

Notre jeune femme se fond et se confond avec délectation dans ces décors. De ce fait, notre esprit se trouve stimulé. Des effets illusoires surprenants, un délicieux jeu acrobatique, une exultation charnelle tout en pudeur et un brin de magie. Voici le savoureux mélange contribuant à la création de l’univers singulier, parfois déroutant, mais toujours touchant de Victoria Thiérée-Chaplin, la fille de Charlot.

Le temps d’une soirée, laissez-vous porter par cet étonnant monde imaginaire 🙂

by Jean-Philippe

murmures des murs

Murmures des murs

De et mise en scène : Victoria Thierrée-Chaplin
Avec : Aurélia Thierrée, Jaime Martinez et Antonin Maurel

Du 1er au 3 février à 20h30,  matinée le 3 à 15h

Théâtre Le 13ème Art
Centre commercial Italie 2
Place d’Italie
75013 Paris

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